2012-05-18

 

En cherchant la déchirure du ciel

Les premières nouvelles de Dave Côté dans Brins d'éternité et Solaris ont retenu l'attention des lecteurs et des critiques. Elles mariaient une écriture aussi efficace que vivante à des histoires singulières qui témoignaient d'une imagination originale. Les attentes étaient donc élevées dans le cas de son premier roman, Noir azur (Sherbrooke, Les Six Brumes, 2011), un ouvrage relativement court — il fait moins de 200 pages et les paragraphes se réduisent parfois à des bouts de phrase — qui n'est pas dépourvu pourtant de réelles trouvailles. Côté semble avoir choisi de jouer la difficulté. Il a fait le pari de prendre pour protagoniste un personnage à la mémoire extrêmement floue, qui s'incarne de manière épisodique dans la peau d'un autre et qui découvre en même temps que les lecteurs un monde décalé.

Le narrateur naît donc à la conscience de soi dans un vieil édifice où un groupe s'est réuni dans l'espoir de trouver un monde meilleur. Car le monde s'est transformé. Le ciel n'est qu'une immense bâche, la nature est en plein dépérissement et le sol même se dérobe sous les pieds des survivants.  Dans les villes, les habitants se passionnent pour des parties de hockey devenues des combats de gladiateurs ou mènent une existence plus ou moins robotisée.  Mais les jeunes rencontrés par le protagoniste croient à l'existence d'un monde avec sa part de ciel bleu...

J'ai aimé l'identité du personnage principal qui incarne en définitive une promesse, et même un engagement amoureux à la vie et à la mort. J'ai moins aimé les personnages qui semblent d'une grande naïveté, en particulier quand ils se laissent abuser par les mensonges maladroits du narrateur.   Plus un univers est étrange, plus un auteur a intérêt à mettre le lecteur en confiance et à le convaincre qu'une explication cohérente des actions posées par les personnages ou du devenir de l'univers sera fournie.  Dans le cas de ce livre, l'explication n'arrive jamais.  Il s'agit tout au plus de s'éveiller du rêve — ou du cauchemar — en ayant conquis le droit d'espérer.

Si Noir azur est un ouvrage plus ou moins imparfait de par un récit entrecoupé par les absences du narrateur et par des actions extrêmes incomplètement justifiées, ce roman convie également ses lecteurs à espérer de Côté des ouvrages d'un intérêt supérieur, qui combineront l'originalité de son imagination et une plus grande cohérence dans la présentation de l'histoire.

Libellés : ,


Comments: Publier un commentaire

<< Home

This page is powered by Blogger. Isn't yours?