2011-02-22

 

Que veut Legault?

Le manifeste de la CAQ (ou CPAQ) dont je parlais hier ne comporte pas vraiment de nouvelles idées dont l'originalité pourrait provoquer la discussion. Par conséquent, la réaction populaire espérée par ses auteurs doit concerner leur crédibilité — et la crédibilité de ceux qui se proposent de les mettre en œuvre. Une idée ne compte que si sa réalisation est possible advenant une élection qui porterait ses partisans au pouvoir. Mais la probabilité qu'un Legault soit porté au pouvoir dans le contexte actuel n'est pas énorme — même si elle n'est pas nulle.

De sorte qu'il est permis de se demander si Legault ne caresse pas l'espoir que, durant l'intervalle censément alloué aux réactions du public, ses idées soient adoptées par un parti susceptible de les défendre, ce qui lui épargnerait toutes les peines qu'exigerait la création d'un nouveau parti.

Il y en a déjà qui (comme Jean Allaire) poussent à l'union sacrée de la droite, qui prendrait la forme d'un regroupement de l'ADQ et de la CPAQ. Mais ce n'est pas certain que l'ADQ soit favorable à un manifeste réformiste mais relativement respectueux du statu quo — qui écarte plus ou moins clairement certaines des lubies de la droite adéquiste.

Reste le PLQ. En apparence, Charest est bien en selle et il peut espérer que Legault contribue à diviser l'opposition aux Libéraux. Mais le manifeste de Legault est loin d'être incompatible avec les orientations des Libéaux de Charest. Du coup, il est permis de se demander si Legault ne souhaite pas alimenter ou attiser les dissensions au sein même du PLQ. De l'extérieur, le gouvernement du PLQ apparaît comme l'instrument d'un seul homme, Jean Charest, qui a mis à la porte tous les trouble-fête potentiels, d'une manière ou d'une autre: Pierre Paradis dès 2003, Marc Bellemare en 2004, Thomas Mulcair en 2006 et Philippe Couillard en 2008... Mais il en va sûrement de même au sein du PLQ qu'il en allait au sein des dictatures arabes les mieux assises, avant la chute de Ben Ali et Moubarak... la solidité et la solidarité sont de façade, mais il ne faudrait qu'un choc pour qu'émergent des solutions de rechange.

Est-ce la fin d'un cycle politique au Québec? Au début du cycle précédent, au siècle dernier, les trois principaux partis ont été dirigés par des chefs parachutés ou appelés à jouir d'une situation hors du commun dans leur rôle de par les circonstances de leur arrivée au sommet.

Mario Dumont était pratiquement le fondateur conjoint de l'ADQ quand il en est devenu le chef quelques mois après la fondation du parti en 1994. Lucien Bouchard a hérité du PQ en 1996. Et Jean Charest a été catapulté à la tête du PLQ en 1998. Bouchard est parti le premier, en 2001, imité par Dumont en 2009, mais Charest s'accroche encore.

En ce moment, le seul chef de parti dans la même situation que les Dumont, Bouchard et Charest d'antan, c'est Amir Khadir, que certains désignent comme le politicien le plus populaire du Québec. Ce n'est sans doute pas un hasard : le Québec francophone est enclin à un certain messianisme depuis fort longtemps et accorde volontiers plus d'attention aux personnages charismatiques qui peuvent se poser en sauveurs, en remontant au moins à Duplessis qui a pris le pouvoir en pleine Dépression.

Legault aspire-t-il à réaliser une OPA du PLQ en éliminant Jean Charest à la faveur d'un soulèvement sinon du peuple québécois (tout entier) du moins des Libéraux du PLQ?

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