2009-04-04

 

Et si la culture contre-attaquait?

Après l'offensive conservatrice, il est temps de penser à la contre-attaque. On peut certes signer des pétitions pour déplorer les coupures à Radio-Canada et mobiliser les artistes pour qu'ils s'expriment sur toutes les tribunes disponibles, on peut même former l'union sacrée au Québec pour stopper les Conservateurs de Harper, mais ceci n'aura qu'un effet limité hors de certains milieux, et de certaines frontières. Alors, comment faire?

Il y a déjà deux ans et demi, quand Harper avait commencé à s'en prendre à la culture (en ciblant les musées, par exemple), j'avais écrit en septembre 2006 que cela lui coûterait des voix, mais qu'il fallait se demander si cela lui coûterait la prochaine élection. Et j'avais répondu :

« Pas si sûr. Les Libéraux ont commis l'erreur, durant leurs dernières années au pouvoir, de se montrer également peu réceptifs aux priorités plus culturelles ou sociales. On se souviendra de la promesse de dernière minute d'augmenter le budget du Conseil des Arts du Canada... Par conséquent, ils sont mal placés pour bénéficier d'un rejet des Conservateurs de Harper sur ce front. Quant au Québec, tant que le Bloc continue à jouer le blocage, il ne pourra pas vraiment peser dans la balance. Son importance va diminuer, d'ailleurs, maintenant que l'Alberta et la Colombie-Britannique ont le même poids démographique ensemble que le Québec. »

Depuis, les Conservateurs de Harper ont clairement fait une croix sur le Québec. Ils se contenteront de rafler quelques sièges dans les circonscriptions qui votent par esprit de contradiction et ils cibleront les autres provinces, ou se résigneront à enchaîner les gouvernements minoritaires. Le fait est que la crise parlementaire de décembre dernier a montré que la voie est étroite pour les Libéraux comme pour les Conservateurs. Impossible de renverser le gouvernement en chambre et d'espérer prendre le pouvoir avec une coalition : Harper a démontré qu'il est prêt à attiser les tensions entre anglophones et francophones de sorte qu'un gouvernement avec l'appui des Bloquistes serait discrédité à l'extérieur du Québec. Et l'électorat du Bloc serait plus que réticent à soutenir un gouvernement fédéral, et forcément fédéraliste. Par conséquent, le gouvernement ne sera battu que s'il le veut ou que si les trois autres partis jugent de leur intérêt — au même moment — d'aller en élection. Ce n'est pas impossible, mais c'est suffisamment improbable pour assurer aux minorités conservatrices une durabilité surprenante.

Certes, depuis 2006, je crois que le secteur culturel s'est plus ou moins réconcilié avec les Libéraux. Mais si la culture compte pour beaucoup dans l'économie du Québec, ce n'est pas nécessairement le cas ailleurs au Canada. Par conséquent, tant que le Bloc dominera au Québec, le gouvernement Harper pourra se permettre de sabrer presque impunément dans la culture et dans tout ce qui touche le Québec, et plus que jamais puisqu'il est maintenant établi que le Bloc est un tigre de papier qui peut empêcher un parti de gagner au Québec, mais pas de remporter suffisamment de sièges ailleurs pour former un gouvernement. Et tant que le Bloc ne pourra pas appuyer un gouvernement de rechange en chambre, une minorité à l'échelle du pays deviendra une majorité dans la Chambre des Communes.

Bref, si le secteur culturel québécois voulait contre-attaquer de manière efficace, peut-être devrait-il cibler le Bloc...

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Comments:
«Bref, si le secteur culturel québécois voulait contre-attaquer de manière efficace, peut-être devrait-il cibler le Bloc...»

"Cibler.... en quel sens faut-il l'entendre ?

TSPM
 
Eh bien, à Terre-Neuve, Danny Williams avait lancé durant la dernière élection le mouvement ABC, Anything But Conservative. On pourrait imaginer l'équivalent au Québec : « Tout sauf le Bloc et les Conservateurs », ce qui pourrait donner la campagne ABC : Anti-Bloc et Conservateurs.

Je précise que, bien entendu, cela n'empêcherait pas le vote indépendantiste de favoriser le PQ au provincial, ou de s'abstenir au fédéral, mais il me semble de plus en plus évident que la présence du Bloc a châtré le Québec comme force politique au fédéral. Ce qui est loin de nuire à ses objectifs, bien entendu.
 
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