2008-02-17

 

Mobilité

En principe, le film Jumper arrive à point pour le public canadien. L'hiver complique toujours les déplacements, mais le protagoniste de Jumper transcende les limitations matérielles et spatiales qui réduisent la liberté de mouvement des autres. Dans une ville enneigée, qu'y a-t-il de plus agréable à envisager que le pouvoir de se téléporter instantanément sur une plage tropicale ou dans une ville exotique? L'autre nuit, en revenant d'Ottawa, mon autobus ne s'est-il pas retrouvé bloqué à l'entrée du terminus montréalais par un tas de neige dans lequel il s'est enlisé? Après de longues minutes de tentatives infructueuses pour se dégager, le chauffeur a bien dû renoncer et laisser les passagers descendre. Une odeur de graisse brûlée avait d'ailleurs commencé à envahir l'intérieur du véhicule... En rentrant à pied hier soir après le film, je suis passé à côté de la caserne où j'avais photographié en janvier dernier un blindé de l'armée canadienne sous la neige. Si les tanks rêvent, celui-ci rêvait peut-être au sable chaud de l'Afghanistan. En se téléportant ou non.Mais Jumper ne remplit pas ses promesses. Certes, les voyages instantanés sont au rendez-vous. Mais le personnage principal, joué par Hayden Christensen de Star Wars, rappelle Brad Pitt à son moins intéressant. Une mâchoire bien taillée, et pas grand-chose de plus. Au début du film, quand le protagoniste vit la belle vie, la télévision dans son appartement diffuse des images de victimes d'une inondation ou d'un raz-de-marée. Il faudrait un miracle pour les sauver, entend-on, et le spectateur se demande si David va trouver un moyen d'intervenir. Mais non, il passe une excellente journée à faire du surf, pique-niquer en Égypte et hanter les bars de Londres. Comme il a aussi piqué de l'argent à des banques et le dépense sans scrupules apparents, David apparaît comme un jeune homme dont la principale vertu, dans le film, est d'aimer son béguin de jeunesse, Millie, et de ne pas achever son ennemi juré, Roland. Ce n'est pas exactement suffisant pour faire de lui quelqu'un de sympathique. Et quand il essaie de faire équipe avec un autre téléporteur, Griffin, on les voit tous les deux se balader (et se battre) de lieu en lieu sans grand souci pour les personnes innocentes qu'ils pourraient blesser ou gêner.

Quant à l'intrigue du film, elle repose principalement sur l'existence de « Paladins » qui pourchassent les « Jumpers » pour les tuer. Or, ceci représente l'apport principal de l'adaptation hollywoodienne du roman Jumper de Steven Gould, roman pour jeunes qui a connu beaucoup de succès en prouvant qu'il était encore possible d'écrire de la science-fiction aimée des jeunes, et je ne crois pas que la grève des scénaristes puisse servir d'excuse. C'est un cliché, un gros cliché, et il n'était déjà pas très convaincant lorsqu'on nous l'avait servi dans Highlander en 1986, il y a vingt-deux ans. Il a désormais épuisé tout son intérêt. Qu'on le laisse aux films de vampires et qu'on n'en parle plus!

En cours de route, David retrouve sa mère, qui est dans le camp des Paladins et qui y reste, ce qui est peut-être censé préparer un autre film. Mais j'espère que non. Il y a des scènes qui résistent à l'analyse ; à Tokyo, Griffin téléporte une voiture dans la circulation de la ville et on se demande bien comment ceci est censé passer inaperçu. Quant au dénouement dans l'appartement de Millie où David est supposément réduit à l'impuissance, je n'ai toujours pas compris comment il parvient à se téléporter quand même. Amor omnia vincit? C'est bien commode... mais on reste loin des classiques du genre, comme The Stars My Destination.

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