2007-06-07

 

Armes et bio-armes

Dans la trilogie White Queen de Gwyneth Jones, des extraterrestres issus d'une civilisation qui a maîtrisé les biotechnologies arrivent sur Terre et ils sont alors médusés de constater que des animaux qu'ils assimilent à des bio-armes sont traités comme de simples compagnons, voire des jouets pour enfants. Il s'agit bien sûr des chiens et autres animaux domestiques. Je trouve le concept utile, car si on se met à envisager les chiens comme des bio-armes, on les change de catégorie...

En 2004, 23 Canadiens ont été tués accidentellement par des armes à feu (trois autres Canadiens ont été occis par une arme à feu dans des circonstances qui ne permettaient pas de trancher entre l'accident et le suicide); les statistiques disponibles indiquent que, de 1970 à 2001, le nombre de morts accidentelles causées par des armes à feu n'a cessé de baisser, tombant de 129 et 143 en 1970 et 1971 respectivement à 20 et 28 en 2000 et 2001 respectivement. En ce qui concerne les blessures causées accidentellement par des armes à feu, les statistiques sont plus difficiles à trouver. Une source cite un taux moyen de 1,5 pour 100 000 durant la période 1990-1998; pour une population de trente millions de personnes, ce qui est légèrement excessif, cela correspondrait à 450 cas par année. Mettons 400 par an.

Quels sont les chiffres correspondants pour les conséquences des accidents impliquant des chiens? On entend régulièrement parler de morts et blessures imputables à des chiens, mais les statistiques ne sont pas nombreuses. Ce qu'on peut trouver indique que les chiffres seraient comparables à ce qu'on observe aux États-Unis, où on parle de cinq millions de morsures par année. Or, en partant d'une enquête d'un coroner québécois qui aurait rapporté en 1999 qu'il y avait eu 117 000 cas de morsures au Québec en 1997 et 1998, on arriverait, par extrapolation, à un demi-million de cas pour tout le Canada, ce qui est du même ordre qu'aux États-Unis, toutes proportions gardées. Quant aux décès imputables à des chiens, ils seraient de l'ordre de 15 à 20 annuellement aux États-Unis, ce qui correspondrait à un ou deux cas par année au Canada. En ce qui concerne les rapports entre les morsures ou décès et les races de chiens, on peut lire ce rapport (.PDF) de Merritt Clifton, qui a colligé des données pour la période allant de 1982 à 2006 sans faire de distinction entre le Canada et les États-Unis, mais en se limitant aux cas où la race du chien était bien identifiée.

Évidemment, les morsures infligées par les chiens sont de gravité variable. On a sans doute toujours raison d'amener un enfant mordu à l'hôpital, mais le traitement requis et les conséquences redoutées (infection?) dans le cas d'un mordillement par un chiot n'ont rien à voir avec les effets d'une attaque susceptible de mutiler à vie... Néanmoins, le nombre des morsures est si grand que même en admettant que la plupart ne sont pas sérieuses, il semble bien qu'il doive rester plus de cas graves, sur ce demi-million de morsures, que l'ensemble des cas de blessures par arme à feu. On notera qu'une étude a fait ressortir qu'un tiers des cas exigeant des soins hospitaliers résultaient de l'attaque par un chien d'un étranger et que le visage avait souffert dans 40% des cas...

Tout cela complique la comparaison des armes à feu et des bio-armes. D'une part, la vingtaine de décès causés annuellement par des armes à feu l'emportent de beaucoup sur les cas isolés attribuables à des chiens. D'autre part, le nombre de blessures attribuables à des chiens est bien plus élevé que le nombre de blessures accidentelles causées par des armes à feu. Quand on songe qu'il y aurait trois fois plus d'armes à feu que de chiens au Canada, on se demande bien lesquelles de ces armes sont les plus dangereuses...

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Comments:
Il faut aussi tenir compte des avantages de la co-existence avec des chiens. Ainsi, leur présence oblige les paresseux dans mon genre à marcher tous les jours, un exercice salutaire. Parions qu'à l'échelle du Canada cela sauve beaucoup plus que deux décès causés par crises cardiaques et autres ACV.

Joël Champetier
 
Il y a de nombreuses variables que j'ai choisi d'ignorer. Les propriétaires de fusils pourraient sans doute faire valoir que la chasse leur permet aussi de faire de l'exercice en pleine nature... Les propriétaires d'armes de poing qu'ils portent sur leur personne pourraient faire valoir qu'ajouter de manière quotidienne quelques centaines de gramme à la charge déplacée brûle des calories supplémentaires et contrôle la prise de poids!

En revanche, il semble clair que si de nombreux criminels et suicidaires se servent délibérément d'armes à feu pour tuer ou blesser, on a peu de cas connus de chiens utilisés de la même façon au Canada. (Sauf pour se défendre de bêtes sauvages, ours
ou autres.)

En ce qui concerne les chiens, les données fiables manquent, mais ce que je trouve intéressant, c'est la tendance. Depuis 1970, le nombre de morts attribuables à des décharges accidentelles d'armes à feu a sans doute été divisé par 10, toutes proportions gardées. A terme, si la tendance se maintient, cette donnée pourrait rejoindre le nombre de morts imputables à des chiens, toutes proportions gardées... Il suffirait de diviser par 3 les chiffres actuels pour les morts accidentelles causées par des armes à feu.

Ce qui changerait le débat, dans un sens ou dans l'autre.
 
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