2006-12-24

 

Charité chrétienne

Miroir, miroir, dis-moi qui sont les plus charitables?

Selon Arthur Brooks, il faut être pauvre, croyant et conservateur pour être champion en matière de charité. Du moins aux États-Unis. Évidemment, il commence par soutenir — d'une manière qui doit plus à la conclusion qu'il désire formuler qu'à un examen objectif des faits — que la charité n'en est plus quand c'est le gouvernement qui distribue l'argent. Autrement dit, quand un individu donne de l'argent à Centraide, disons, pour que Centraide vienne en aide aux gens dans le besoin, c'est un don charitable. Mais quand l'ensemble des citoyens élisent des représentants qui décident de prélever une partie du bien commun pour venir en aide aux gens dans le besoin, ce n'est plus de la charité.

L'autre jour (le mercredi 20), Brooks avait été l'invité de l'émission The Agenda de TVO, qui s'interrogeait sur la place de la charité dans notre société. Brooks avait donc chanté les louanges des citoyens les plus conservateurs des États-Unis, qui sont aussi les plus généreux. Dans une certaine mesure, il permet de compléter le portrait esquissé par Sam Harris dans Letter to a Christian Nation. Plusieurs blogueurs en ont parlé, dont Laurine Spehner sur Fractale Framboise.

Brooks affirme avoir tenu compte du fait que les dons officiellement reconnus comme charitables ne sont pas toujours destinés à des bonnes œuvres. Aux États-Unis, on peut donner à une église (pour son fonctionnement ou pour l'enrichissement des héritiers de L. Ron Hubbard) et cela passera pour de la charité. Mais il reste deux questions que je ne pourrai éclairer qu'en lisant son livre.

Tout d'abord, il y a la question du rapport de cause à effet que soulève Harris quand il s'agit de savoir si les États les plus conservateurs des États-Unis (les « red states ») sont conservateurs parce qu'ils sont plus affectés par la pauvreté, la violence, la criminalité, etc., ou si c'est le contraire. De la même façon, on peut se demander si les conservateurs sont plus charitables parce qu'ils vivent dans des États où la misère et la criminalité sont plus présentes, ou si c'est uniquement parce qu'ils sont plus religieux ou conservateurs.

Ensuite, il y a la question de l'efficacité. Brooks écarte du revers de la main les contributions de l'État-providence, mais il faudrait quand même savoir, avant de se disputer comme des chiffonniers pour savoir qui est plus charitable, si la charité sert à quelque chose ! Les États peuplés de croyants conservateurs charitables (CCC) sont-ils des endroits où il fait mieux vivre ? A priori, non, ou du moins pas toujours. Pour ce qui est de l'espérance de vie, les pires résultats sont obtenus dans les États où les CCC sont particulièrement nombreux (même si la corrélation entre « red states », « blue states » et l'espérance de vie n'est pas systématique). C'est d'ailleurs ce qui complique le problème du rapport de cause à effet...

Bref, faut-il s'abstenir de donner en ce temps de Noël ? Certainement pas, mais il faudrait sans doute ne pas se sentir trop vertueux si on fait la charité...

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