2006-06-29

 

Un millier de visages

Je suis en train de boucler le septième des cours sur l'histoire de la technologie que j'ai donnés à l'Université d'Ottawa, presque exactement deux ans après l'amorce du premier cours, début juillet 2004. En fait, ce début du mois de juillet coincé entre les fêtes nationales du Canada et des États-Unis prend une place grandissantes dans les annales de ma vie. C'est dans la nuit du 3 au 4 juillet 1992 qu'un collègue et ami, Mike Fieldus (.PDF), du département d'astronomie de l'Université de Toronto, mourait tragiquement. Et c'est le 4 juillet 2004 que j'ai terminé la rédaction de ma dissertation (.PDF) de doctorat — même si elle a connu plusieurs révisions par la suite, je considère qu'elle a été complétée à ce moment.

Je ne peux pas m'empêcher de calculer qu'en deux ans et demi, j'ai eu un millier d'étudiants différents dans ces cours. Le chiffre est impressionnant; d'emblée, il permet de comprendre que j'ai à peine eu l'occasion de faire connaissance avec plus qu'une fraction minime de ce nombre. Il n'y a qu'à faire le calcul : en moyenne, j'ai eu près de 150 étudiants par classe...

Dans un billet visible ici, Daniel Fortier propose quelques réflexions sur l'éducation au Québec. Il n'a pas grand-chose à dire sur l'enseignement à l'université, car il se concentre sur l'enseignement aux paliers inférieurs, et sur l'enseignement de la pédagogie à l'université. Mais une des plaies de l'enseignement universitaire, c'est évidemment qu'il est donné la plupart du temps par des contractuels. (Il paraît qu'à l'Université d'Ottawa, ce sont des contractuels et des professeurs à temps partiel qui donnent la majorité — 55% — des cours!) Et la taille des classes, comme je le constate dans mon cas, est loin des plafonds pour lesquels se battent les enseignants des niveaux inférieurs.

Dans les deux cas, cela complique les tentatives d'appliquer la plupart des recommandations pédagogiques. Un contractuel soumis à l'incertitude perpétuelle des renouvellements de contrat ne va pas nécessairement s'investir dans l'amélioration de son enseignement. Sa rémunération, surtout en Ontario, est déjà si maigre que, dans les faits, quand les heures réelles consacrées au cours sont comptées, elle est loin de correspondre à ses qualifications. Et la taille des classes restreint dramatiquement la gamme des approches pédagogiques envisageables.

La situation actuelle est peut-être appelée à se régler, dans la mesure où les jeunes Canadiens d'âge universitaire vont se raréfier au fil des ans. Mais si la proportion des classes d'âge optant pour l'université augmente et si les universités continuent à recruter des étudiants étrangers, il faudra que la société finisse par réinvestir dans la rémunération des enseignants à temps partiel au niveau universitaire, car le besoin sera là.

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