2005-12-02

 

Les élections canadiennes

Les médias sont décidément les porte-voix des mécontents. Des mois durant, les partis de l'opposition ont réclamé des élections pour mettre les Libéraux à la porte, et les médias ont suivi attentivement chaque péripétie de leur lutte à la Chambre des Communes. Des mois durant, des citoyens indignés par le scandale des commandites ont réclamé des élections.

Maintenant qu'il y aura des élections en janvier, plusieurs politiciens se plaignent d'être obligés de faire campagne pendant les Fêtes, les uns et les autres s'imputant la responsabilité de la tragédie en question. Quant aux journalistes, ils étaient catastrophés. Ils seraient obligés de quitter leurs bureaux chauffés et leurs fauteuils moelleux pour sillonner le pays en compagnie des politiciens, par des températures hivernales. Sort cruel.

Le public? Il se plaint du coût de l'élection et aussi d'être obligé de retrouver plus ou moins les mêmes le matin du 24 janvier... Du coup, on aura entendu plusieurs voix plaider pour des élections à dates fixes. Une telle règle empêcherait le parti au pouvoir de manipuler le processus électoral pour se faire réélire. L'Assemblée législative de l'Ontario examine en ce moment un projet de loi qui ferait du premier jeudi en octobre la journée désignée pour des élections provinciales, tous les quatre ans.

Mais je ne peux pas m'empêcher de regarder du côté des États-Unis et de penser que le système parlementaire conserve des avantages. En ce moment, le président Bush est en mauvaise posture, sa popularité est au plus bas et les membres de son parti sont mal à l'aise face aux échecs de ses grandes initiatives politiques. Mais il est inamovible. Il occupera la présidence jusqu'à la fin de son mandat constitutionnel, point à la ligne.

Un système parlementaire est un peu plus flexible. Il est certes possible pour un premier ministre impopulaire de s'accrocher (on se souviendra des derniers mois de Brian Mulroney) jusqu'à la fin du mandat de cinq ans, mais comme le premier ministre est aussi le chef du parti (soit du parti tel qu'il existe dans l'enceinte parlementaire, soit d'un parti plus large), le parti s'inquiétera de la possibilité de perdre le pouvoir quand un premier ministre devient par trop impopulaire et celui-ci se fera montrer la sortie. Cela peut se passer brutalement (comme lorsque les Conservateurs en Angleterre ont évincé Thatcher) ou cela peut se passer en douceur (si le chef accepte d'annoncer sa démission et de provoquer une course à la chefferie, comme dans le cas de Chrétien). Cela ne sauvera pas nécessairement le parti (on se souviendra de Kim Campbell... oui?), mais l'option a l'avantage d'exister et d'abréger les dégâts potentiels que peut causer un chef du gouvernement dont l'impopularité est justifiée.

Quand le parti ministériel ne jouit que d'une courte majorité ou est carrément minoritaire, son impopularité encouragera les défections ou même les combinaisons de ses adversaires pour le faire tomber. Dans ce cas, c'est l'existence même du gouvernement qui sera abrégée.

Et si les électeurs reportent au pouvoir les mêmes, ceux-ci en auront peut-être retiré quelque salutaire leçon. Bref, s'il me faut choisir entre le système canadien qui nous offre un premier ministre affaibli à la tête d'un gouvernement minoritaire et le système étatsunien qui maintient au pouvoir (et avec les pleins pouvoirs!) un président impopulaire, à la légitimité contestée, je crois que je sais lequel des deux me semble préférable...

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